Lorsque son réveil sonna, Samuel le programma plusieurs fois de suite pour rester à dormir quelques minutes de plus. Était-ce une erreur ? Bien évidemment, tout le monde aurait été d’accord, mais Samuel le fit malgré tout.
Après avoir dormi trente minutes de plus (le chanceux) il se décida enfin de se lever et d’aller se préparer pour son premier jour de travail. Sortant du lit, jetant ses jambes hors de son lit et se levant avec difficulté et accompagné de beaucoup de grognements de mécontentement. Ayant l’habitude de tomber sur des petits boulots qui concernaient les soirées, il n’avait plus l’habitude de se lever si tôt. Bien qu’il n’avait pas travaillé la veille, il avait passé une bonne partie de sa soirée à essayer de ranger son appartement (qui était vraiment mal rangé pour le si peu de pièces, deux, qu’il y avait) et n’avait vu qu’il était plus de minuit. Ses voisins devaient être en faire circuler une pétition pour le voir quitter l’immeuble. Le temps de manger un bout et d’aller se laver (plusieurs heures à ranger, déplacer des meubles et faire le ménage ça encrasse étonnamment) il finit par s’endormir à presque deux heures du matin, ce qui ne séparait son réveil que de quatre heures à peine. Il était persuadé qu’il n’allait pas se rendormir en cours de route, mais il avait eu tort.

N’ayant pas eu l’impression de s’être de nouveau endormi longtemps, Samuel ne pensa pas un instant à vérifier l’heure. Il fut surpris lorsqu’il remarqua qu’il ne restait plus que dix petites minutes avant le début de son service. Il n’habitait pas loin, donc il avait le temps d’y aller. Le seul problème était qu’il était encore en sous-vêtements, buvant son café sans grand problème et sans se presser. Autant dire que, lorsqu’il vit l’heure tardive, il se précipita dans la salle de bain, se lava en vitesse, s’habilla aussi vite que possible et regroupa ses affaires pour sortir. En fermant la porte à clé, il se rendit compte qu’il avait oublié son téléphone dans sa cuisine, il entra pour le récupérer et ressortit aussi vite que possible. Il descendit les escaliers en glissant son sac à dos sur son épaule, manquant de tomber en voulant sauter la dernière marche. Il poussa la porte du hall en saluant une voisine qui passait par là (elle semblait aussi en retard que lui) et commença à courir dès qu’il arriva sur le trottoir d’en face. Il passait à côté des personnes qui marchaient sans vraiment s’en préoccuper et il lui arriva de pousser deux ou trois personnes (il ne prit pas le temps de s’excuser, chaque seconde passée à être désolé était une seconde de plus sur son temps de retard) qui râlèrent, bien évidemment.
En une dizaine de minutes, il fit le chemin complet et manqua même de se faire renverser en voulant traverser la rue sans regarder (il avait beau être en tort dans l’histoire, cela ne l’empêcha pas de s’énerver face au chauffeur, ce qui lui fit perdre plusieurs secondes précieuses). Il arriva enfin à la clinique, complètement essoufflé de ces dix minutes de course matinale. Entrant, il remarqua que personne ne patientait dans la salle d’attente, il se dirigea vers l’accueil, où quelqu’un semblait l’attendre. En regardant sa montre, il vit qu’il avait presque dix minutes de retard.

« Bonjour ? » dit-il, se demandant s’il s’adressait à la bonne personne.

Samuel ne croyait pas vraiment aux coïncidences, il pensait toujours que si quelque chose arrivait, il y avait une bonne raison. Il ne savait pas quelle bonne raison l’avait mis dans la situation actuelle, mais il était presque persuadé que le karma lui jouait des tours. À force de mentir à sa famille, il savait bien que tout ceci allait finir par lui exploser à la figure. Malgré tout, le premier scénario qu’il avait imaginé était ses parents qui souhaitaient venir le voir, et à qui il était forcé de dire la vérité, et de montrer à quel point il perdait du temps et à quel point il était incapable de prendre sa vie en main.
Certes, ce qui était sur le point de se passer n’était pas aussi grave que le premier scénario, mais c’était le premier pas vers ce qu’il ne voulait sous aucun prétexte : devoir l’annoncer à ses parents.

Quand Kaylee arriva, elle n’eut pas l’air de faire attention à Samuel, ce qui l’arrangeait, d’ailleurs. Peut-être était-ce idiot, mais il n’avait pas envie d’aborder le sujet lui-même, Kaylee allait devoir le remarquer elle-même, cela allait bien finir par arriver. Se cacher ainsi ne menait à rien, mais Samuel n’était pas toujours quelqu’un de très logique, comme tout le monde après tout.
Elle commença à lui expliquer qu’elle était celle qui allait le former dans la matinée et précisa qu’elle espérait qu’il n’était pas allergique aux poils de chats. Elle s’arrêta net juste après ces mots. Tandis qu’elle se retournait, Samuel cherchait des excuses quant à sa présence à Manchester, ville où il n’était pas censé être.

« Hello. » lui répondit-il quand elle inclina la tête et prononça son nom.

Il souriait pour cacher l’état de panique dans lequel il se trouvait. Chaque neurone de son cerveau essayait d’inventer la parfaite excuse, mais il n’y arrivait pas. Comment allait-il expliquer qu'il n'était plus à Londres ?

« Comment tu vas ? » demanda-t-il en essayant de gagner du temps.

Samuel savait pertinemment qu’il ne servait à rien de gagner du temps, elle allait finir par poser la question et il allait devoir trouver quelque chose à raconter, quelque chose de convenable et crédible, qui n’allait pas ressembler à un très gros mensonge.
Sans le savoir, ni le vouloir, il avait sauté à pieds joints dans une situation bien compliquée.