Jack Davis

Une petite citation qui déchire ici

FICHE PAR ATHENA.

Derrière L'écran

C'est mon histoire ...

Une petite citation qui déchire ici

J’fais partie de ses gamins qui n’ont jamais eu de chance dans leur vie. Enlevé quand j’étais môme, élevé dans une famille qui n’a jamais été la mienne, puis balancé de famille d’accueil en famille d’accueil à partir du moment où les flics sont venus me chercher, j’ai mal démarré d’emblée dans la vie. J’ai jamais connu mes vrais parents, n’ai aucune idée de mon vrai nom. Si ça m’a fortement perturbé étant gamin, les choses sont différentes à présent. Mal dans ma peau, rebelle de service, j’ai rapidement fini à la rue avec mes problèmes. C’est pas comme si j’avais eu le choix, de toute façon. J’ai tenté de survivre, à force de mendier, pour quelques malheureuses piécettes. J’ai jamais été doué pour ça. Mendier, supplier, c’était trop me demander. Ca l’a toujours été. Voler, ça, j’étais doué. Et me foutre dans la merde, accessoirement. Ca a commencé par quelques portefeuilles, quelques bijoux, des trucs à la con, jusqu’à ce que je me fasse repérer, que je finisse par toucher à la drogue. A partir de là, ça a vraiment commencé à foirer.

Il s’appelait Matt. On a tout de suite bien accroché. On est devenus super potes.  Il est devenu mon univers à lui tout seul, mon point d’accroche, le frère que je n’avais jamais eu. C’est lui qui m’a offert mon premier fix. J’ai plongé dedans la tête la première. Et j’ai adoré ça. Beaucoup trop. Il m’a fait rencontrer ses potes, un groupe de camés tout aussi jetés que nous. On a fini dans un squat, le genre d’endroits où on est pas censés être mais où le monde nous fou la paix. Et c’est tout ce que je voulais. Un endroit où crécher, pour me défoncer tranquille, sans rien demander à personne. C’est là que j’ai rencontré Néo. Il m’a salement tapé dans l’oeil. Mais c’est Matt qui a eu ses faveurs. C’est avec lui qu’il a fini, sans que je n’ouvre jamais la bouche pour l’en empêcher. Parce que Matt n’avait jamais autant sourit qu’avec lui. Qu’il lui offrait une petite étincelle de bonheur dans ce désastre qu’étaient nos vies. Et que c’est tout ce que je voulais, le voir heureux, lui.

Les choses se sont enchainées. Les fix, la drogue, le fric qui part plus vite qu’une trace de coke. Il nous fallait de la thune pour payer notre héro. Et c’était à moi de m’y coller. J’étais le plus doué de la bande. Je connaissais des gens. Il en fallait pas plus. Et puis, ça me faisait une bonne excuse pour me barrer quand la vision de mes potes me devenait trop insupportable. Les clients, c’était pas ce qui manquaient. Et puis, ce fut la débandade. La fois de trop. Les flics m’ont chopé. J’avais beaucoup trop sur moi. J’ai fini direct en taule, sans préavis, sans moyens de m’en sortir. J’avais déjà pas les moyens de me payer un toit, alors un avocat, fallait pas rêver. J’ai pris pour tout le monde. Le sevrage, le manque, la vie en taule. Le manque de lui, aussi. Apprendre par sa bouche que Matt était mort d’une overdose. Ca a sans doute été plus dur que tout le reste. Ne pas abandonner. Ne pas tout foutre en l’air. J’en ai bavé. Ca m’a fait sauter 5 ans de ma vie. 5 putain d’années. Sortie pour bonne conduite. J’ai tourné la page. Je me suis rangé. J’ai arrêté mes conneries. J’ai surtout pas replongé. Je voulais m’en sortir. Coûte que coûte. Essayer, au moins.

C’est à ma sortie que j’ai rencontré Nancy. Ca n’a pas duré longtemps. Juste celui de faire un enfant. Adam. La prunelle de mes yeux. Sans lui, j’aurais sans doute replongé. Sans lui, j’en serais pas là aujourd’hui. J’suis devenu mécano, est reprit le garage d’un vieux pote après qu’il m’a formé. Ca suffit pas. Un gosse ça coûte cher, surtout quand on veut lui offrir une belle vie. J’ai pas le choix. Je fais le transporteur. J’veux pas savoir ce qu’il y a dans mon coffre, jamais, mais ça paye bien, alors je ferme ma gueule et je fais mon job, en espérant que la vie continue à m’offrir la rédemption. En espérant ne jamais me faire prendre. Et en pensant à lui, Néo, de temps en temps. Et à Matt. Comme une vieille cicatrice qui me relance quand il fait trop humide. J’évite de trop penser pour me concentrer sur l’essentiel, sur mon fils. En oubliant le reste. C’est mieux comme ça.